Lorsque j’ai pris mes fonctions en février 2012, j’avais une certaine vision de ce qui pourrait être réalisé au cours de mon mandat eu égard à la situation sanitaire régionale. Cinq années passent très vite ; je me suis donc fixé comme priorité, immédiatement après mon élection, de mener une analyse approfondie du développement sanitaire dans la Région et de procéder à une évaluation rapide des défis existants, des lacunes observées et des mesures qu’il faudra prendre, en consultation avec les partenaires et autres parties prenantes régionaux. En mars 2012, à l’issue d’une réunion d’experts de haut niveau, un consensus s’est dégagé sur les défis à relever pour réaliser des progrès tant dans le domaine de la prévention et de la maîtrise des causes principales des problèmes de santé et de la charge de morbidité, que dans celui du renforcement des systèmes de santé, de la santé de la mère et de l’enfant ou également au niveau des orientations stratégiques majeures. Il s’agit du renforcement des systèmes de santé ; de la santé maternelle, génésique et infantile et de la nutrition ; des maladies non transmissibles ; des maladies transmissibles ; de la préparation et de l’intervention en cas de situations d’urgence et enfin de la gestion et de la réforme de l’OMS. D’autres consultations ont donné lieu à l’élaboration du document intitulé « L’avenir de la santé dans la Région OMS de la Méditerranée orientale : renforcer le rôle de l’OMS »1. J’ai partagé ce document avec des ministres de la Santé à Genève juste avant l’Assemblée mondiale de la Santé en mai 2012. Du fait du large consensus obtenu de la part des États Membres sur le contenu de ce document, je me suis vu confier un mandat clairement défini pour agir. Les excellentes observations qu’ils m’ont adressées m’ont fourni une orientation supplémentaire sur certains de ces domaines stratégiques. En octobre, le Comité régional de l’OMS pour la Méditerranée orientale a discuté des orientations futures et a adopté des résolutions pertinentes concernant le renforcement des systèmes de santé, un cadre d’action sur les maladies non transmissibles et la maîtrise des évènements de santé publique revêtant un caractère international par le biais du Règlement sanitaire international. Le Comité a également appuyé les mesures que j’avais introduites pour mettre en œuvre les principes de la réforme de l’OMS, alors en discussion au niveau mondial ; ainsi que quelques observations importantes des auditeurs de l’OMS et des États Membres eux-mêmes.
Fin 2012, le Bureau régional avait également entrepris une évaluation rapide des progrès accomplis sur la voie de la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement 4 et 5 qui ont trait à la santé de la mère et de l’enfant dans les 10 États Membres qui ont la plus forte charge de mortalité dans la Région. Les résultats ont été par la suite présentés à la réunion de haut niveau organisée en janvier 2013 à Dubaï sur le thème « Sauver les vies des mères et de l’enfant », afin d’accélérer les progrès en vue de la réalisation de ces objectifs. Le renforcement de l’information sanitaire, un domaine du système de santé essentiel pour la planification et la surveillance sanitaires, a également fait l’objet d’une attention particulière. En 2012, l’ensemble des États Membres a entrepris une évaluation rapide de leurs systèmes d’enregistrement des actes et des statistiques d’état civil, une réalisation majeure en soi qui donnera lieu d’ici la fin 2013 à l’élaboration de plans nationaux, d’une liste d’indicateurs de base et d’une stratégie régionale pour le renforcement de ces systèmes.
La période de 11 mois entre février et décembre a ainsi été très chargée pour l’OMS et les États Membres. Ce travail préparatoire nous a permis de jeter les bases sur la voie du progrès. Cependant, d’énormes difficultés continuent d’entraver l’amélioration de la santé dans la Région. La mise au point d’une démarche permettant de réaliser la couverture sanitaire universelle par le biais de systèmes de prépaiement qui fonctionnent pour tous est pour moi une question prioritaire. Il est choquant de constater que la Région ne compte que pour 1,6 % des dépenses mondiales consacrées à la santé alors qu’elle représente 8 % de la population mondiale. De nombreuses personnes dans la Région n’ont ni assurance sociale, ni facilité d’accès aux soins de santé. Lorsque leur famille ou eux-mêmes nécessitent un traitement, ils doivent s’en passer, ou bien sacrifier un revenu dont ils ont tant besoin. Il s’agit au XXIe siècle d’une situation peu satisfaisante pour notre Région. Néanmoins, même dans les pays où le financement des soins de santé ne pose pas de problème, les systèmes de santé subissent d’importants déficits sur lesquels il faut se pencher avant que l’accès à des soins de santé de qualité puisse être garanti.
Une autre question importante est l’impact des situations d’urgence causées par les catastrophes naturelles et les crises politiques sur la santé des populations affectées, sur les systèmes de santé et sur le développement socio-économique. Ces deux dernières années, 13 pays de la Région ont connu de telles situations d’urgence, avec plus de 42 millions de personnes touchées. Une des plus marquantes a été la détérioration rapide en 2012 de la situation humanitaire en République arabe syrienne qui, au bout d’une année, a entraîné plus de 6,8 millions de personnes nécessitant une assistance dans l’ensemble du pays, ainsi que 4,25 millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays et 1,6 million de réfugiés dans les pays voisins.
La transmission de la poliomyélite persiste en Afghanistan et au Pakistan, constituant ainsi une menace pour le programme d’éradication mondiale et pour les États Membres libérés de la maladie. L’année 2012 a vu une intensification des efforts accompagnés d’importantes réalisations, notamment la réduction notable du nombre de cas dans ces deux pays. Cependant, l’insécurité actuelle, la campagne de désinformation contre la vaccination et les récentes attaques à l’encontre d’agents de santé engagés dans la lutte contre la poliomyélite viennent saper tout optimisme résultant de ces réalisations. Cette situation est très grave et exige une vaste intervention.
Les intérêts économiques et géopolitiques qui exercent une influence sur le programme global de santé et de politique étrangère appuient ou entravent de plus en plus les progrès réalisés dans le domaine du développement sanitaire. L’Assemblée générale des Nations Unies a reconnu ce lien à plusieurs reprises et nombre d’initiatives on vu le jour au sein de l’Organisation afin de mieux préparer les États Membres et le personnel au contexte modifié dans lequel doivent être abordés les défis en matière de santé. Dans ce contexte, le Bureau régional a organisé un séminaire sur la diplomatie sanitaire mondiale qui a été l’occasion de rassembler les représentants des ministères de la Santé et des Affaires étrangères pour examiner les façons de renforcer les capacités en vue d’instaurer une diplomatie de la santé dans la Région. Les participants ont discuté des moyens par lesquels la politique étrangère peut soit entraver, soit aider le domaine de la santé, ainsi que des préoccupations en matière de politique étrangère que posent les maladies infectieuses émergentes, les questions de santé en période de conflit et de reconstruction après les conflits. Cette initiative en est encore à ses débuts et je continuerai de la faire progresser afin de promouvoir le développement de la diplomatie sanitaire dans la Région, notamment la coopération et les partenariats entre les pays sur des questions de santé prioritaires telles que le Règlement sanitaire international et l’éradication de la poliomyélite ainsi que la promotion d’une approche fondée sur les droits dans le cadre de l’action du secteur de la santé, dans le but de renforcer l’équité en santé et la couverture sanitaire universelle.
Le présent rapport annuel définit une nouvelle voie pour la présentation des informations sur l’activité de l’OMS aux niveaux régional et national. Les chapitres suivants sont consacrés aux priorités stratégiques identifiées ainsi qu’à la gestion et à la réforme de l’OMS. Ils présentent les défis spécifiques auxquels s’attaquera l’OMS, sur un ensemble de problèmes existants, ainsi que le travail qui a été amorcé pour y faire face. Dans les prochains rapports, je prévois de rendre compte des progrès accomplis dans chacun de ces domaines en fonction de critères et d’étapes précis. Le présent rapport ne couvre pas tous les programmes techniques de l’OMS mais offre plutôt un aperçu de l’important travail entrepris dans les domaines prioritaires2. J’espère recevoir des commentaires et des observations sur le rapport de la part des États Membres, des partenaires et d’autres parties prenantes.
1. L’avenir de la santé dans la Région OMS de la Méditerranée orientale : renforcer le rôle de l’OMS. Le Caire, Bureau régional de l’OMS pour la Méditerranées orientale, 2012.
2. 2 Cinq annexes présentant la structure du Bureau régional, le personnel, les réunions, les publications et les centres collaborateurs peuvent être consultées sur le site Web du Bureau régional à l’adresse suivante http://www.emro.who.int/about-who/annual-reports/ .