Mohamed Abdullahi, le point focal pour la vaccination dans la partie centrale de la Somalie, est chaque jour réveillé par les bruits d’explosions et de coups de feu. Depuis plus de vingt ans, Mogadiscio, ville dévastée par la guerre, est occupée par des chefs de guerre, des dirigeants religieux fondamentalistes et un certain nombre de combattants étrangers. La capitale a connu trois gouvernements successifs et le pays a été confronté, il y a peu, à l’une des pires famines depuis des années.
Se déplacer dans Mogadiscio est difficile et dangereux, ce qui rend l’organisation des activités de vaccination risquée. Un des précédents ministres de la Santé a été tué lors d’une cérémonie de remise de diplômes dans une école de médecine et des explosions ont eu lieu sur des terrains de football et au théâtre national. « Tout le monde a peur de venir en groupe, mais nous continuons à nous déplacer ensemble », affirme Mohamed. « En 2010, nous avons lancé la première Semaine OMS de la vaccination en Somalie. En 2011, nous étions toujours en proie au même malaise mais nous avons renouvelé l’opération. Et cette fois encore, nous allons faire de même », ajoute Mohamed, déterminé à concrétiser cette Semaine de la vaccination en 2012, à Mogadiscio, ravagée par la guerre.
En dépit des risques, les agents chargés de la vaccination en Somalie ont pu atteindre 817 496 enfants âgés de moins de 5 ans et leur administrer les vaccins contre la rougeole et la poliomyélite sur une période de deux semaines. « Nous sommes conscients des risques mais nous sommes aussi convaincus de la nécessité d’assurer les services de vaccination pour sauver les vies de nos enfants », confie Mohamed.
Les personnes en charge de la vaccination dans les pays en situation d’urgence se retrouvent parfois confrontées à des circonstances dépassant leur domaine de responsabilités pour aider les personnes dans le besoin.
En Iraq, les membres d’une équipe chargée de la vaccination dans le gouvernorat de Missan ont remarqué, durant leur visite, de la fumée s’échappant d’une maison isolée en pleine campagne. En s’approchant de la source de la fumée, ils virent qu’un incendie s’était déclaré dans la maison avec une famille piégée à l’intérieur. Sans aucune hésitation, ils bravèrent le feu et sauvèrent la mère et ses enfants.
Dans le gouvernorat de Nasria, les membres d’une autre équipe mobile étaient entrain de vacciner des enfants en bas âge lorsqu’ils remarquèrent qu’une des mamans était sur le point d’accoucher. Une femme parmi les agents de vaccination est alors intervenue pour l’aider à mettre au monde une magnifique petite fille, nommée Rajaa en l’honneur de cet agent.
Malgré ces interruptions inattendues, les agents chargés de la vaccination en Iraq ont toutefois réussi, en 2011, à s’assurer qu’au moins 50 % des parents et personnes s’occupant d’enfants n’ayant pas reçu la totalité des vaccins dans les zones à faible couverture vaccinale prennent conscience de l’importance de prendre tous les vaccins inscrits dans le calendrier vaccinal.
Au Soudan du Sud, il est extrêmement compliqué d’atteindre chaque enfant du fait de l’insécurité, de la population mobile et migrante et des conditions géographiques difficiles telles que la pluie et le mauvais état des routes. En dépit de ces obstacles, l’OMS, le ministère de la Santé et l’UNICEF ont lancé la campagne « Pour un Soudan du Sud libéré de poliomyélite », qui a pour objectif de cibler plus de 3,2 millions d’enfants âgés de moins de 5 ans dans la totalité des états du Soudan du Sud par le biais d’appels à la vaccination porte-à-porte.En gardant tous ces éléments présents à l’esprit, on s’aperçoit qu’être agent de vaccination exige d’être bien organisé, d’avoir une bonne communication et faire preuve de détermination pour ne laisser aucun enfant de côté. Dans le comté de Tambura, État d’Équatoria occidental, un agent de vaccination parvient à surmonter les obstacles géographiques en se déplaçant à vélo pour accéder aux enfants ayant besoin d’être vaccinés. « La seule façon pour moi d’atteindre tous les enfants des zones qui me sont définies par le plan d’itinéraires quotidien établi par le chef d’équipe est d’utiliser mon vélo. Cela est dû aux très grandes distances et à l’absence de routes pour les véhicules. Il n’y a qu’un seul sentier pédestre. Il m’arrive parfois d’aller dans certaines zones à pied car elles sont inaccessible en vélo », explique-t-elle.