La COVID-19 entraîne un renforcement des capacités de l’OMS en ce qui concerne les soins critiques et les unités de soins intensifs (USI) dans les pays en situation de fragilité, de conflit et de vulnérabilité

24 février - Avant la pandémie de COVID-19, dans la plupart des pays fragiles, touchés par des conflits et vulnérables de la Région de la Méditerranée orientale, les capacités en matière d’unités de soins intensifs ou de soins critiques étaient faibles ou inexistantes, malgré le besoin urgent de ces pays de prendre en charge les blessures mortelles par balle, le manque de soins de traumatologie et la prévalence des maladies infectieuses, entre autres.

Avec l’émergence de la COVID-19, les populations de ces pays sont devenues les plus exposées. Outre l’accès minimal aux soins critiques, tous les établissements existants ont été submergés par les vagues successives de COVID-19 et de nombreux agents de santé ont été immédiatement affectés dans les unités de soins intensifs spécialisées dans la COVID-19 afin de prendre en charge les patients en état critique.

Dans le cadre de la riposte à la COVID-19 mise en œuvre par le Bureau régional de l’OMS pour la Méditerranée orientale dans les premiers jours de la pandémie, les pays de la Région ont commencé à recevoir des ventilateurs médicaux et d’autres équipements biomédicaux destinés au traitement des cas de COVID-19. Cependant, des décès évitables ont continué d’être enregistrés et des taux de létalité élevés ont été observés dans les pays en situation de fragilité, avec dans certains cas des taux de mortalité due à la COVID-19 proches de 100 % après admission à l’hôpital.

Une riposte multidimensionnelle

Le Dr Chiori Kodama, médecin au Bureau régional de l’OMS pour la Méditerranée orientale et responsable de la prise en charge clinique de la COVID-19 au sein de l’équipe d’appui à la gestion des incidents, rapporte que « lorsque l’épidémie de COVID-19 s’est déclarée, les pays fragiles, touchés par des conflits et vulnérables et disposant de ressources limitées ne comptaient que très peu de médecins et de personnels infirmiers en unités de soins intensifs. Ainsi, de nombreux agents de santé issus de domaines différents ont été redéployés, ce qui explique qu’ils ne savaient pas comment prendre en charge les patients en état critique placés en unités de soins intensifs malgré leurs efforts inlassables pour sauver des vies. Nous avons dû repartir de zéro. »

Des formations axées sur la demande ont donc été élaborées par l’équipe de prise en charge clinique de la COVID-19 du Bureau régional de l’OMS pour la Méditerranée orientale et dispensées par le biais de missions sur le terrain et via Internet auprès des agents de santé en première ligne dans les pays en situation d’urgence complexe et aux ressources limitées, ainsi que dans les pays à revenu intermédiaire de la Région.

Sur le terrain

Recipient of WHO critical care/ICU training Dr. Razia Ghafaari, sole woman doctor at the Afghan-Japan Hospital, the largest COVID-19 referral hospital in Kabul, AfghanistanBénéficiaire de la formation aux soins critiques/intensifs dispensée par l’OMS, le Dr Razia Ghafaari, seule femme médecin au centre hospitalier Afghan-Japan Hospital, le plus grand hôpital de référence pour la COVID-19 de Kaboul, en Afghanistan

En Afghanistan, 7834 agents de santé ont bénéficié d’une formation pratique en soins intensifs/critiques dispensée par des consultants de l’OMS dans le cadre de missions sur le terrain. « Je suis la seule femme médecin à m’occuper de patients atteints de COVID-19 au centre hospitalier Afghan Japan Hospital de Kaboul », explique Razia Ghafaari. « Le soutien que l’OMS et l’Union européenne nous ont apporté nous a permis de prendre en charge des patients originaires de nombreuses provinces d’Afghanistan, en particulier ceux qui étaient dans l’unité de soins intensifs. »

Des dizaines d’agents de santé ont été formés au Pakistan et huit formations de formateurs ont été assurées lors de la mission sur le terrain assurée en Somalie.

En Iraq, les formations de formateurs dans le domaine des unités de soins intensifs/soins critiques et de l’évaluation des USI ont permis à 87 médecins-chefs et personnels infirmiers affectés dans les unités de soins intensifs réservées aux patients COVID-19 d’améliorer leurs compétences. Dans le même temps, les formations à l’utilisation d’équipements biomédicaux et à la sécurité incendie ont renforcé les capacités de nombreux agents de santé à travers le pays. Une formation en cascade aux soins intensifs/critiques au niveau national est prévue en temps voulu.

Healthcare professional during WHO critical care/ICU training at Shifa Medical Complex in Gaza ©2020 WHO. Photo credit: AbdelRahman JarourProfessionnels de santé participant à la formation aux soins critiques/soins intensifs dispensée par l’OMS au Shifa Medical Complex à Gaza ©2020 OMS. Crédit photo : AbdelRahman Jarour

Dans la Bande de Gaza, dans le Territoire palestinien occupé, deux missions de terrain ont contribué à l’évaluation des besoins et à la formation de formateurs pour les unités de soins intensifs/les soins critiques. Ces formations ont depuis lors été répercutées pour faire progresser la capacité d’environ 1000 médecins et infirmiers.

Zaharia Sakallah, responsable de service client, a livré un combat acharné contre la COVID-19 pendant 58 jours dans un hôpital de Gaza. Les agents de santé hospitaliers, qui n’avaient jamais été formés aux soins intensifs/critiques, ont bénéficié d’une formation de l’OMS axée sur les compétences permettant de sauver des vies. « Je retrouve lentement mais sûrement la santé », confie Zaharia et ajoute : « Le soutien apporté par les équipes médicales […] a été exceptionnel et je suis convaincue que c’est à ces soignants que je dois en grande partie mon rétablissement. »

Le Yémen, en particulier, qui ne disposait pas de capacités de soins intensifs/critiques dans les hôpitaux publics avant la pandémie de COVID-19, a grandement bénéficié des efforts déployés conjointement avec le bureau de pays de l’OMS. Ce pays a également tiré parti des trois missions de terrain mises en place par le Bureau régional de l’OMS pour la Méditerranée orientale, en vue de former 1259 agents de santé en soins intensifs ou en soins critiques, d’augmenter l’approvisionnement en oxygène médical et d’évaluer les unités de soins intensifs afin de déterminer les besoins immédiats en fournitures d’importance vitale et de combler les lacunes. Expression concrète de la solidarité régionale, Oman s’engage à fournir un appui technique dans le domaine des unités de soins intensifs/soins critiques afin de renforcer les capacités des agents de santé au Yémen, en créant un « projet de jumelage » entre les deux pays.

Via Internet

En outre, des formations virtuelles ont été dispensées à plus de 10 000 agents de santé dans tous les pays mentionnés ci-dessus, ainsi que dans cinq autres pays fragiles, touchés par des conflits et vulnérables, à revenu faible ou intermédiaire de la Région de la Méditerranée orientale. Par ailleurs, une série de webinaires a été lancée dans les 22 pays de la Région afin de renforcer les compétences de plus de 20 000 professionnels de santé.

Au-delà de la COVID-19

Le Dr Kodama a indiqué « qu’en plus du programme régional de formation de base aux soins critiques et aux soins intensifs à l’intention des médecins et du personnel infirmier, nous avons également dû mettre en place un instrument d’évaluation des unités de soins intensifs pour les établissements à ressources limitées, car lorsque la COVID-19 a commencé, nous ne disposions pas d’outils de ce type pour évaluer la capacité actuelle des unités de soins intensifs, ce qui était essentiel pour approvisionner en temps opportun les unités de soins intensifs en fournitures d’importance vitale. »

L’OMS déploie actuellement des efforts pour passer de la riposte initiale à l’urgence dans ce domaine à un renforcement durable des capacités permettant de fournir aux patients des soins critiques adéquats au-delà de la COVID-19, afin de permettre aux agents de santé de prendre en charge un plus large éventail de situations critiques. Ce projet, dont la mise en place est prévue dans un plus grand nombre de pays fragiles, touchés par des conflits et vulnérables de la Région, est actuellement expérimenté au Yémen. À cette fin, le 1er février 2022, le Bureau régional de l’OMS pour la Méditerranée orientale a envoyé son consultant pour les situations d’urgence, le Dr Gary Greg Kuniyoshi, au Yémen pour une période de trois mois, afin de fournir un appui technique et un accompagnement directement au chevet des patients, dans l’objectif d’améliorer plus efficacement la pratique des soins critiques dispensés par les agents de santé de première ligne.

Un effet boule de neige

Plusieurs ministères de la Santé, ainsi qu’un grand nombre d’hôpitaux situés dans les pays fragiles, touchés par des conflits et vulnérables ont également demandé un appui technique au Bureau régional de l’OMS pour la Méditerranée orientale afin de consolider les compétences permettant de sauver des vies de leurs agents de santé en première ligne, en demandant la mise en place de programmes de formation nationaux durables et à long terme dans le domaine des unités de soins intensifs et des soins critiques.

Grâce aux formations en cascade organisées par les bureaux de pays de l’OMS et aux efforts sans relâche de l’équipe de prise en charge clinique de la COVID-19 du Bureau régional de l’OMS pour la Méditerranée orientale, le nombre cumulé de professionnels de santé de la Région qui sont désormais mieux armés pour répondre aux besoins des patients en unités de soins intensifs ou en soins critiques, et ainsi pour sauver des vies, a dépassé le chiffre de 40 000.